Dissociation traumatique

Disjonction du circuit émotionnel et dissociation traumatique par Muriel Salmona
« Cette disjonction, en isolant l’amygdale cérébrale, éteint la réponse émotionnelle et fait disparaître
le risque vital en créant brutalement un état d’anesthésie émotionnelle et physique. Mais cette
disjonction est à l’origine d’une dissociation traumatique, un trouble de la conscience lié à la
déconnection avec le cortex, qui entraîne une sensation d’irréalité, d’étrangeté, d’absence, et qui
donne à l’enfant l’impression d’être spectateur des événements, de regarder un film.
Grâce à cette dissociation les agresseurs ne sont pas gênés par des signaux de détresse trop
importants de leurs victimes, c’est très dangereux pour les enfants car les actes violents pourront
devenir de plus en plus extrêmes, sans qu’ils puissent y réagir. L’anesthésie émotionnelle ne les
empêchera pas d’être encore plus traumatisés. De plus, comme cette dissociation transforme la
victime en automate, l’agresseur en fera ce qu’il veut et pourra facilement lui imposer de participer
aux violences et de répéter des phrases de pseudo-consentement : « dis-moi que tu aimes ça, et que
c’est ce que tu veux !». L’agresseur pourra arguer qu’il n’a pas commis de violence et que l’enfant
était consentant, et les policiers, les gendarmes, les juges, par méconnaissance de ces processus de
dissociation pourront reconnaître l’enfant comme consentant, comble de l’injustice… C’est
flagrant également lors des viols en réunion d’adolescentes, qui, totalement dissociées, restent sans
réaction, ou s’exécute face aux injonctions des violeurs, et passent pour avoir été consentantes.
Cette dissociation traumatique qui peut durer des heures, des jours, des mois, voire des années si
l’enfant continue à subir des violences, ou s’il reste en contact avec l’agresseur et ses complices, va
faire que l’enfant anesthésié émotionnellement, semblera indifférent, déconnecté en permanence.
Alors que chacun a la capacité de percevoir de façon innée les émotions d’autrui, grâce à des
neurones miroirs, en face d’une personne anesthésiée il n’y aura pas de ressenti émotionnel, ce n’est
qu’intellectuellement qu’il sera possible d’identifier la souffrance de cette personne. Les proches et
les professionnels, ne comprenant pas cette dissociation y réagiront par une absence d’empathie,
une minimisation des violences subies par l’enfant, et de sa souffrance, une incrédulité, voire une
remise en question de sa parole et de la réalité des violences.
De plus, l’enfant dissocié est souvent considéré comme débile, inconséquent, incapable de
comprendre ce qui se passe et d’y réagir, et il sera en but à des moqueries, des humiliations et des
maltraitances de la part de tous. Dans le film Polisse nous assistons à une scène de ce type avec la
jeune ado qui a été obligée de faire des fellations à plusieurs garçons pour récupérer son portable,
elle semble si indifférente à la situation que les policiers se permettent de lui faire la leçon et même
de se moquer d’elle en lui posant la question : «et si on t’avait pris ton ordinateur portable qu’est-ce
que t’aurais fait ?» et toute la salle de cinéma d’éclater de rire… »